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Le Safran du Québec

De l'or rouge dans nos jardins

Fleur sans frontières

Une fleur mythique, précieuse, fragile, connue depuis la plus haute Antiquité. Elle symbolise à la fois la beauté et la sagesse, le goût et la santé, le parfum et l’élégance, la subtilité et l’intelligence. Vénéré dans les civilisations antiques et considéré comme une plante divine, le safran était utilisé aussi bien comme aromate qu’en teinture, comme médicament ou en parfum. Dans l’habillement, le safran incarnait la puissance céleste et la hiérarchie.

Dans son parcours à travers le monde et le temps, et riche de ses 6000 ans d’histoire, le précieux safran a rejoint le Québec en 2012, traversant l’Atlantique au départ de la France, dans un voyage parsemé d’embuches et d’espoir. Accueilli « à l’essai », il a su relever le défi de l’acclimatation et s’imposer à nous comme la voie à suivre. C’est ainsi que la première safranière commerciale au Canada s’est installée à St-Élie-de-Caxton, à l’été 2013. En 2015 la safranière déménage à Notre-Dame de Montauban et en novembre 2018, à la suite du décès de son co-fondateur, Pur Safran devient la propriété de Vivianne Martel qui réinstalle celle-ci avec sa propre safranière à Ste-Christine d’Auvergne.

Fleur d'histoire

Le Safran est l’épice la plus ancienne de la planète, ce qui explique le mystère entourant son origine. Selon des recherches botaniques récentes, il serait originaire de Crète et non du Cachemire, comme on le disait autrefois. Le safran n’existe pas à l’état sauvage. Il a un pollen stérile et ne produit donc pas de graines. Il est cultivé et multiplié uniquement par ses bulbes. Selon les recherches botaniques, il résulterait d’une sélection de Crocus Cartwrightianus, par des producteurs qui désiraient de plus longs stigmates. L’analyse de l’ADN de Crocus Sativus confirme que le Crocus Cartwrightianus est l’ancêtre le plus vraisemblable du safran. Il aurait ainsi été cultivé tout d’abord en Grèce et c’est l’hypertrophie engendrée lors des croisements qui aurait rendu le safran stérile. Mais ce sont les Perses qui seraient à l’origine des premières exportations de safran, l’introduisant dans les pays du monde antique, enseignant sa culture et ses propriétés à de nombreux peuples.

 

Les plus anciens vestiges de safran se trouvent sur le site d’Akrokiri, dans l’île grecque de Santorini. Il s’agit de fresques où l’on voit de petites touffes de safran cueillies par des femmes. Ces fresques sont les premières représentations botaniquement exactes de la plante. Elles ont été recouvertes, et donc protégées, par des cendres volcaniques issues de l’explosion de l’île, datant de 1650-1500 avant J-C.

La plus ancienne mention de safran en cuisine est perse et date de plus de 5000 ans alors que le cuisinier du roi Zohac l’aurait utilisé pour badigeonner le dos d’un veau avec du vieux vin et de l’eau de rose.

Le mot « safran » tire son origine de l’arabe asfar signifiant jaune via le mot zaferân qui est le nom de l’épice en arabe et qui fait allusion à la couleur dorée obtenue par la teinture végétale qu’on en extrait. Cette étymologie se retrouve dans plusieurs langues – allemand (saffran), anglais (saffron), espagnol (azafran), finlandais (saframi), italien (zafferano) – et Le latin s’en inspirera pour arriver au terme français que nous employons aujourd’hui.

Le mot « crocus », son nom botanique, est quant à lui la transcription latine du mot grec krokos qui signifie fil ou filament, et qui désignait à l’origine les stigmates de la plante, longs et fins. C’est également le nom d’un village de Macédoine où la culture du safran occupe encore des centaines d’hectares

La fleur est composée de trois pétales très redressés et trois sépales de la même forme et de la même couleur variant du violet pâle au mauve foncé.

Fleur de légendes

La légende la plus connue vient de la mythologie grecque, où l’on présente Crocos comme un très beau jeune homme éperdument amoureux de l’inaccessible nymphe Smilax. Il aurait été charmé par la nymphe puis ensuite rejeté après qu’elle s’en soit lassée. Pour répondre à l’insistance de Crocos, Smilax l’aurait ensorcelé et changé en fleur, le condamnant ainsi rivé au sol, à la contempler sans jamais pouvoir s’unir à elle…

Selon une autre légende, Crocos serait mort, touché accidentellement à la tête par son ami Hermès alors que les deux amis jouaient au lancer du disque sur l’Olympe. Trois gouttes de sang auraient coulées de sa blessure et entrées dans la terre, la fécondant. A cet endroit précis apparut une magnifique fleur mauve au pistil rouge sang, formé de trois stigmates. Depuis ce jour tragique, la fleur de safran, baptisée de son nom, devint le symbole de la vie et de la résurrection. Sa bien-aimée Smilax, accablée de chagrin, se serait alors muée en fleur, la Smilax aspera, communément appelée la salsepareille..

Alexandre le Grand aurait été arrêté dans sa conquête de l’est… à la suite de l’apparition de fleurs de safran qui auraient recouvert le sol du campement où il était installé avec son armée. De peur d’être sous l’emprise d’un sortilège et devant ce signe des Dieux, il mit un terme à sa conquête et fit demi-tour avec ses hommes, sans combattre.

Michel-Ange aurait utilisé de la teinture de safran pour les fresques de la chapelle Sixtine.